Article publié le 28/05/2024

Dans le cadre du programme Upcycling, qui rassemble des projets qui luttent contre la pollution plastique, la Fondation de la Mer soutient les Petits Labos, un laboratoire de recherche et de création interdisciplinaire. À la croisée entre l’art, les nouvelles technologies et l’écologie, les Petits Labos sont une association novatrice et expérimentale qui donne vie à des œuvres artistiques en plastique recyclé.
L’association en deux mots par ses créateurs : Conscience. Précieux.

Un laboratoire artistique

Diego Ortiz et Hernan Zambrano se sont rencontrés dans le cadre de leurs études en art et design au sein du laboratoire de recherche EnsadLab, de l’École Nationale Supérieure des Arts Décoratifs de Paris. Grâce à leurs années de recherche sur les processus de transformation de la matière, de l’interactivité et de la lumière, des projets expérimentaux émergent. C’est ainsi que naissent Les Petits Labos, un laboratoire d’expérimentation. 

PortraitD&H

Des oeuvres révélatrices de la santé de la planète

Les techniques employées se basent sur le biomimétisme, en s’inspirant de la nature avec des matériaux qui ne sont pas forcément d’origine naturelle. Cette démarche reflète les domaines sur lesquels s’appuient Diego Ortiz et Hernan Zambrano, l’environnement et les technologies (Low-tech, DIY).

Depuis la création, à l’aide de matériaux qu’ils recyclent, jusqu’à la fin de vie des projets, qui sont parfois retransformés, leurs œuvres questionnent les réalités écologiques actuelles.
Plastique, chutes de bois… Les deux artistes-chercheurs broient et créent eux-mêmes la plupart de leurs matériaux, leur offrant une seconde vie plus durable. « Nous travaillons énormément avec le plastique recyclé. C’est plutôt du plastique recyclé « domestique », mais il nous arrive aussi de travailler avec des plastiques sauvages ».

Petpuller machine
« La subvention de la Fondation de la Mer a permis de nous équiper de différents types de machines, telles que des imprimantes 3D, ainsi qu’une fraiseuse numérique. Cela nous a servi à mettre à jour notre parc de machines Precious Plastic, sans lesquelles nous n’aurions pas réussi à mettre en place tous les projets et ateliers que nous faisons aujourd’hui. Sans toutes ces machines, les idées restent des idées, sans la possibilité de les réaliser. »

Découvrir le programme Upcycling de la Fondation de la Mer

 À travers leurs projets, les artistes remettent en question la valeur du plastique et de sa conservation. « Le plastique n’est pas mauvais en soi, c’est son utilisation qui est mal conçue. C’est un matériau qui est ignifuge, qui dure longtemps… Le problème c’est de concevoir des choses jetables. Et nous, on cherche à donner une valeur symbolique à ces déchets pour faire en sorte que les gens les gardent plus longtemps. »

Les créations ont vocation à s’inscrire sur le long terme. Certaines seront pérennes, d’autres réutilisées pour construire les suivantes. Leur processus créatif s’inscrit lui-même dans un cycle complet de recyclage, utilisant à répétition leurs matériaux. « Comment l’œuvre va-t-elle évoluer ? Le plus important c’est ce qu’on conçoit, ce qu’on vit, l’expérience en elle-même. » 

"The shape of things to come", témoin de la qualité de l'air

Présentée dans le cadre de la Fête des Lumières à Lyon en 2022

Un oiseau qui construit son nid à la verticale, avec du plastique, ce n’est pas ce qu’il y a de plus commun. C’est cet aspect original qui a poussé Les Petits Labos à reproduire le nid de l’oiseau jardinier, un « artiste de la nature » comme le soulignent Diego Ortiz et Hernan Zambrano. Entre bouchons et pailles, l’oiseau se débrouille pour constituer son nid. Composée d’arches, l’œuvre “The shape of Things to Come” ou “la forme des choses à venir”, est entièrement constituée en plastique recyclé, à l’image du nid de l’oiseau qui a inspiré la création.

Témoins de la qualité de l’air, les arches lumineuses représentent chacune l’état de la qualité de l’air d’une journée. Lorsque la qualité de l’air est bonne, la couleur de l’arche tend vers le cyan, puis se dirige progressivement vers le magenta au fur et à mesure de la dégradation de l’air. La couleur des arches peut évoluer au cours d’une semaine, donnant à la sculpture un aspect mouvant. Plus la qualité de l’air est mauvaise, plus le mouvement de couleur entre les arches s’accélère.

The shape of things to come
The Shape of Things to Come est l’illustration d’une œuvre binaire. En exploitant d’une part la matière, et d’autre part la lumière et le mouvement, la structure change d’apparence et de symbolique selon le moment de la journée. « C’est le plastique des tupperwares qui permet un certain jeu avec la lumière naturelle. On peut voir cette œuvre changer en fonction du moment de la journée, comme une mise en scène avec la matière, et la nuit ses jeux de lumière lui font prendre une tout autre dimension. »

The Shape of Things to Come (2)
« Plus qu’une œuvre d’art à exposer, c’est une réflexion, un questionnement. Comment seront les objets, les formes du futur ? Dans quelle matérialité vont-ils s’intégrer ? C’est une vision plutôt futuriste et prospective… Cela fait écho à la nature, où rien n’est figé. C’est l’humain qui a tendance à tout figer. ».

Le nid du poisson globe

Pneuma, une œuvre murale exposée en intérieur

Le saviez-vous ? Le nid du poisson globe forme une sorte de mandala dans le sable marin.

PHOTOS PNEUMA

Les Petits Labos ont voulu, grâce à des techniques de modélisation paramétrique (qui permettent de modéliser des formes plus organiques), reproduire ces formes pour mettre en lumière les fonds marins. L’œuvre biomimétique est équipée d’un écran à led et de capteurs de CO2. En fonction de la qualité de l’air que la machine « respire », différentes couleurs et dessins s’affichent pour donner forme à l’état de l’air.

À terme, le projet a pour ambition d’utiliser du plastique issu des milieux côtiers, afin de contribuer à la préservation des milieux naturels. « L’idée, c’est de faire des collectes en milieu sauvage, au bord de la mer, pour transformer ces plastiques en filaments 3D pour continuer à faire ces structures. Exploiter le plastique dans son sens logique et circulaire ».

Un lieu qui engage la transition

panier precious plastic

Au-delà d’un lieu d’expérimentation, Les Petits Labos sont également un endroit de partage et de conscientisation. « Depuis notre installation au Tiers Lab des Transitions, il y a énormément de passage. », expliquent Diego Ortiz et Hernan Zambrano.

« On organise des ateliers parents/enfants dans lesquels les personnes amènent du plastique. On leur explique le procédé de recyclage, on leur fait faire des activités ludiques et ils repartent avec des objets qu’ils font eux-mêmes, comme des petits paniers. » « On a remarqué que souvent les enfants amènent le panier en classe, et font eux-mêmes la médiation sur ce qu’ils ont pu apprendre. Le fait de partir avec un objet est loin d’être anecdotique. Ils partent avec le processus, ce n’est pas juste un objet souvenir. ».

Pour eux, le processus de transformation est une remise en question de la société de consommation, illustrée par un atelier où l’enfant conçoit lui-même son objet, prend conscience des efforts apportés et de la valeur de l’objet.